Depuis l'incident, Carroll s'est beaucoup renfermée. Elle est moins bavarde, plus discrète et porte constamment un masque ; celui d'imbécile heureux. Elle peut paraître souriante et optimiste, mais ce n'est qu'un leurre. Fatiguée que ses sentiments et/ou ses opinions ne soient jamais pris en considérations, Carroll préfère dissimuler ses rancœurs.

Sa nouvelle devise est pour vivre heureux, vivons cachés. Pourtant, Dieu seul sait qu'elle n'aime pas vraiment ça : la solitude, mais il est devenu extrêmement difficile pour la jeune femme d'accorder sa confiance à une personne quelconque. Elle n'en demeure pas moins une bonne poire qui dit oui à tout, parce qu'elle est serviable et que c'est plus simple ainsi. Carroll, s'est beaucoup de contradiction, c'est vivre à l'encontre de ses principes parce que la vie nous y a poussé. En apparence, patiente et sereine, Carroll a aussi ses limites. Son appartement est un véritable capharnaüm. Lorsqu'elle ne dort dans un hôtel pour enchaîner sur un tournoi, elle craque. Elle s'effondre, parfois de désarroi, parfois de colère. Souvent elle se laisse ronger par son mal être. Entre entraînement intensif sur pc / console, crise de nerfs et surtout d'angoisse, les journées sont longues.

Pourtant, elle est tellement mieux chez elle. Du moins, c'est ce qu'elle aime prétendre. Beaucoup s'accordent à dire qu'il s'agit d'une très jolie jeune femme, mais elle refuse d'y croire. Carroll est constamment en train de se comparer aux autres filles de son âge... Elle est coquette et fait de son mieux pour entretenir son image, mais n'en demeure pas moins qu'elle est extrêmement complexée par son physique. Elle se trouve hideuse, à cause de ses cicatrices, à cause du poids qu'elle a prit depuis qu'elle a arrêté le sport, à cause de ce sourire dont elle n'arrive plus à se débarrasser. 

Temporalité:

La boule au ventre Carroll pousse la porte de chez elle. Elle soupire et d'un pas lourd pénètre dans son studio. Elle ferme le verrou, s'avance en direction de son pc pour l'allumer, puis regarde l'heure. 03 AM. Carroll n'a qu'une envie : exploser. Pourtant, elle se contente de sourire une dernière fois avant de se rendre dans la salle de bain. Il faut qu'elle se démaquille. Elle déteste ce moment où elle se retrouve seule, face à la glace, et grimace en voyant son reflet. Elle ne supporte plus ces putains de cicatrices... Elle aimerait pouvoir retourner en arrière et lui répéter, pour la énième fois, que c'est une mauvaise idée.


C'est le grand jour, l'heure approche. Elle est prête. Elle attends patiemment son tour. Elle va devoir tout donner, elle veut rendre sa mère fière. Rien qu'une fois, elle aimerait être à la hauteur. Elle ne tient plus en place. Elle fait les milles pas, quand son partenaire s'approche d'elle. Amber et elle font du patinage ensemble de puis sept ans déjà. Le feeling est tout de suite passé. Elle est heureuse d'en être arriver là, avec lui. Elle le regarde avec un grand sourire, elle est rayonnante. Il semble ailleurs, elle commence à le connaître. Quelque chose le tracasse. Alors elle décide de prendre les devant, mais regrette rapidement quand il parle une nouvelle fois de cette figure. Carroll refuse catégoriquement, ils ne sont pas prêts. Elle insiste bien, ils ne peuvent pas. Ils seraient fous de changer de programme comme ça à la dernière minute. Elle lui répète encore une fois qu'ils ne sont pas au point, qu'il est préférable de garder ça pour les jeux olympiques s'ils sont sélectionnées ; mais qu'ils n'avaient pas là préparation adéquate à l'instant-t. Il ne dit rien, elle pense avoir réussi à lui faire entendre raison. Puis vient leur tour... Carroll est déstabilisée. Elle tente de suivre Amber, elle comprend rapidement ce qu'il fait. Elle tente de lui faire confiance, mais elle n'est pas sereine. Malheureusement, tout s'enchaîne très vite, trop vite et survient l'accident. Elle est au sol, le visage en sang, tout s'arrête. Si seulement il l'avait écouté...

Carroll arrête tout ce jour-là et rentre peu de temps après auprès de son père au Royaume Uni. Enfermée chez elle ne sort plus avant un moment. Elle ne fait que jouer, quand finalement, son père décide de l'inscrire à un tournoi. Elle recommence un peu sociabiliser, mais n'est plus elle-même.



Carroll sursaute quand son téléphone sonne. Il s'agit d'une notification, un message de son père, ce dernier demande si elle a fait bon voyage. Elle tente de l'appeler, heureuse qu'il ne dort pas. Il est certainement l'une des personnes les plus importantes à ses yeux. Et ça, depuis son plus jeune âge. C'est lui qui l'a initié aux jeux vidéo. Sa grande passion depuis toujours. En effet, le patinage, elle aimait ça, mais s'était surtout pour faire plaisir à maman. Quel échec...



Son père l'enlace une dernière fois, et lui répète pour la énième fois de la journée "prends soin de ta mère pour moi". Carroll pleure. Elle ne veut pas vivre loin de lui, elle ne veut pas vivre avec elle. Malheureusement, âgée de neuf ans, elle n'a pas son mot à dire. Elle embarque, prend l'avion pour New York où sa mère l'attend de pieds ferme. Elles ne sont pas très proches, loin de là même. Si Carroll fait la fierté de son père, elle n'est visiblement pas digne de sa mère, et dieu seul sait à quel point cela peut l'affecter. Elle aimerait pouvoir faire plaisir à génitrice, mais ne sait pas comment s'y prendre. Si elle a longtemps été dans l'opposition, elle prend conscience qu'il faut que sa change. Carroll sait qu'elle passe trop de temps devant les écrans aux yeux de cette dernière, alors elle décide de se mettre au sport. C'est ainsi qu'elle va découvrir le patinage artistique. Une activité qui permet à la jeune fille de se rapprocher très légèrement de sa mère.  


Son père répond aussitôt. Soulagée de l'avoir au téléphone, Carroll pleure de joie. Il est habituée, depuis qu'elle est revenu à New York, c'est chose courante. Elle s'excuse honteuse d'être aussi émotive et reprend rapidement le contrôle de ses émotions. Elle met son père en haut parleur et commence à lui raconter la journée de la veille. Le tout en enlevants ses lentilles et en se démaquillant. Une fois prête à se mettre "au lit", Carroll embrasse son père et raccroche. Puis elle s'installe devant son PC et commence à jouer. Elle besoin de lâcher prise.

Les jeux vidéo, un exutoire qu'elle a toujours eu, mais qui lui a presque sauvé la vie après l'accident.