Au premier coup d’œil, Declan apparaît comme une personne très calme, voire même très froide. Plutôt inexpressif, il peut être assez difficile de décrypter ses émotions et ses états d’âme. Pourtant, il n’est pas insensible, loin de là. C’est une carapace qu’il s’est forgé pour faire face à l’incompréhension des gens qui l’ont entouré, en particulier son père avec qui il n’a quasiment plus de contact. Très empathique, il fera toujours tout son possible pour aider quelqu'un, peu importe si c'est un ami, une connaissance, un collègue, ou même un inconnu dans la rue. Il a toujours eu le cœur sur la main, souhaitant la tendre comme il aurait aimé qu’on lui tende plus jeune. Et il n'a jamais rien attendu en retour, pas même de la reconnaissance, le principe d'échange intéressé est pour lui une notion abstraite. C'est une personne foncièrement généreuse, quitte à se mettre en danger lui-même d’ailleurs.

Il est cependant très secret et n’aime pas parler de lui. Il n’a donné qu’une interview dans laquelle il a raconté son parcours et ça ne se reproduira pas. En général, il évite les médias comme la peste et préfère gérer ses réseaux sociaux lui-même, contrôler son image. Pour ce qui est de ce que les gens pensent de lui, ça va être très rapide : il en a rien à foutre. C’est sans doute de là que lui vient son franc parlé, sans qu’il ne manque de filtre non plus. En général, il est même plutôt subtile dans son répondant, il sait très bien mordre avec douceur. Il a par contre un grand intérêt pour l’histoire des autres. Il apprécie quand les gens se confient à lui, leurs histoires, leurs casseroles, bref, une très bonne oreille quand on a besoin de vider son sac, à l’image d’un coiffeur et malgré l’absence de gras sur son épaule à la clavicule creusée, il est agréable d’y pleurer.

Une fois passé outre cette barrière, Declan se fait légèrement plus expressif et se permet d’être un peu plus naturel. On découvre ainsi un côté plus taquin, plus mesquin, voire même un peu tendancieux parfois, comme si son alter égo scénique déteignait sur lui. Il a un gros attrait pour l’humour noir et la dérision, le sarcasme aussi est un mode d’expression chez lui. En dépit de sa froideur apparente et de son calme, Declan est aussi quelqu’un de particulièrement confiant. Totalement décomplexé, il aime beaucoup jouer de son androgynité avec des tenues tantôt strictes, tantôt provocantes. Robe, jupe, body, baggy, costume militaire, tout y passe et toujours avec sa petite touche personnelle. Très à l’aise, il n’a que peu de pudeur, habitué des Drag Show et des coulisses pleines de monde dans tous leurs états. Il peut parfois se montrer un peu maniéré, avec un petit côté bad bitch tout à fait savoureux.

Un point beaucoup plus prononcé lorsqu’il est sur scène. En tant qu’Asmodée, Declan n’hésite pas à jouer de ses charmes. Il se montre beaucoup plus provoquant, voire enragé, en particulier lorsqu’il se produit en concert. Il apprécie particulièrement l’imagerie satanique et l’assume complètement, tout comme son côté “deep dark sasuke”. Il se montre extrêmement plus expressif sur scène, que ce soit pour la musique ou une prestation drag, jouant toujours sur la question qui se pose autour de lui : est-il un humain ou un hybride ?

TIMELINE:

« Qu'est-ce que tu fais Declan ?
- Ça sent le parfum de maman !
- Lâches ça...
- NON. Tu vas le mettre à la poubelle...
- Oui, mais c'est mieux pour nous tu sais ?
- NON ! Je suis pas d'accord !!!
- DECLAN ! Reviens ici tout de suite ! Ramène-moi cette robe sur le champ !!! »

J'ai volé la robe de Maman. J'ai volé les collants de Maman. J'ai volé les talons de Maman. J'ai volé le parfum de Maman. J'ai volé le maquillage à Maman. Papa était pas d'accord, mais moi je voulais pas qu'il jette tout. Je sais qu'il allait tout jeter, pour oublier, pour effacer. Mais je ne veux pas oublier, je ne veux pas effacer. Je ne veux pas effacer la robe de maman qui vole dans un courant d'air à la sortie de l'école, je ne veux pas effacer ma petite main agrippée au collant de maman quand j'ai peur, je ne veux pas effacer les bruits délicats des talons de maman quand elle s'approche de ma chambre pour voir si tout va bien, je ne veux pas effacer l'odeur du parfum de maman qui chatouille mes narines quand elle se penche sur moi pour me faire un bisou, je ne veux pas effacer le cœur en rouge à lèvres sur le miroir quand maman se maquille... Tout ça, je ne veux pas l'oublier. Alors papa a accepté que je garde tout dans un coin de ma chambre, tant qu'il ne voit rien tout va bien. Alors j'ai tout gardé, et quand j'ai peur, je serre sa robe contre moi en espérant qu'elle revienne. Mais elle ne revient pas…


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« J'avais 4 ans à l'époque où ma mère est partie. Mon père en avait 23, il est tombé amoureux d’elle quand il avait 19 ans et elle est tombée enceinte de moi. Alors ils se sont mariés après ma naissance quand ils avaient 20 ans. On m'a souvent dit que c'était normal qu'un couple se brise quand le mariage est si précipité, surtout à cause d’une grossesse non désirée. Alors je me disais que c’était de ma faute si maman et papa s’étaient séparés. Ma mère est partie sans me dire au revoir, « dans les bras d’un autre » m'avait dit mon père. J'ai beaucoup pleuré, mais mon père ne l’a jamais su. Lui aussi il a eu très mal, il est resté triste très longtemps. Mais il ne s'est pas démonté, il s'est toujours très bien occupé de moi, peut-être même trop. Il me disait toujours qu'un papa suffisait amplement, mais j'aurais bien voulu avoir une deuxième maman. Beaucoup de mes amis  à l’époque ont eu « une deuxième maman », voire même deux familles, mais pas moi. Je me disais « Un papa c'est pas comme une maman. Papa n'a pas de robe, ni de collant, ni de talons, ni de parfum aux fleurs, ni de maquillage. Papa ne fait pas de cœur sur le miroir, il ne fait pas de bruit quand il marche et il ne peut pas venir me chercher à la sortie de l'école... »

Alors je suis devenu autonome très rapidement. Même les maîtresses le disaient à mon père quand j'étais petit. Elles ont dit que j'avais eu beaucoup de mal, mais que j'avais fini par remonter la pente. J'ai commencé à avoir des bonnes notes quand j'ai compris que ma mère ne reviendrait jamais et que je devais me contenter des souvenirs que j’en avais. J'ai fait avec, parce que j'avais un bout d’elle à la maison, dans un coin de ma chambre. Mon père pensait que je m'en étais débarrassé, ou il a totalement oublié que j'avais gardé tout ça. Mes amis du collège me disaient que c'était pas normal d'avoir les affaires de sa mère dans sa chambre quand on est un garçon, que je faisais une fixette et que ça en devenait malsain. Bon, ils n’avaient peut-être pas totalement tort… Mais ils ne comprenaient pas, ils ne pouvaient pas comprendre que cette robe, j'en avais besoin. Parce que eux pouvaient avoir un câlin de leur mère. Moi, non. Alors je prenais la robe et je l'aspergeais de parfum. Comme ça, quand je la serrais contre moi, ça sentait « comme maman »... J’avais l'impression qu'elle me prenait dans ses bras, comme avant.

Je serrais cette robe contre moi tous les soirs. Personne ne le savait, pas même mes nouveaux amis du collège suite à un déménagement forcé. Mon père disait que ça serait mieux, parce qu'on changeait d'air. Moi je n'étais pas d'accord. Parce que je n'avais plus la même chambre, MA chambre. La chambre dans laquelle ma mère me serrait contre elle quand je faisais des cauchemars. Ça commençait à faire loin, je ne me souvenais presque plus de son visage. Seulement de ses lèvres en cœur, couverte de rouge à lèvres brillants comme celui que j'avais gardé, de la même couleur que son verni. Je n’en parlais plus aux autres, je gardais ça pour moi car je ne voulais pas être jugé comme j’avais pu l’être par le passé. Je continuais de serrer cette robe contre moi, mais ce n'était pas pareil qu'avant, parce que ce n'était plus la même chambre, parce que son visage s'effaçait doucement de ma mémoire... Mais je ne voulais pas l'effacer, pas comme mon père. Je lui ai demandé un jour, s'il avait réussi à l'effacer. Il m'a répondu que non, que je lui ressemblais trop, que j'avais le même visage mais en plus carré. Les mêmes yeux verts, les mêmes cheveux noirs, les mêmes lèvres en plus fines et le même sourire...

Un jour, je me suis regardé dans le miroir. J'ai fixé mon reflet comme jamais je ne l'avais fixé. Alors je les ai reconnues, les lèvres de ma mère. Mais c'est tout ce dont je me suis souvenu. Alors j'ai sorti la trousse de maquillage que j'avais gardé et j'ai minutieusement appliqué les produits sur mon visage, comme elle le faisait à l'époque, j'ai même mis le verni. Mais il manquait quelque chose. Alors je suis allé dans ma nouvelle chambre, j'ai pris les collants, les talons, la robe, le parfum et j'ai tout mis. J'ai tout mis sur moi et je me suis mis devant le miroir. Et je me suis souvenu, mes souvenirs sont revenus, tous mes souvenirs. Le visage de ma mère, son odeur parfumée, toutes ses jolies robes, ses belles chaussures, ses mains délicates, ses douces caresses sur mon visage, la tendresse de ses baisers sur ma joue, la chaleur de ses étreintes... Toutes ces choses que j'avais mis dans un coin de ma mémoire, en pause. Je venais de tout me prendre dans la figure. Ce soir-là je suis allé me coucher comme ça. Mon père n’a jamais rien remarqué. Je me disais « Tant qu'il ne voit rien, tout va bien ». Puis j’ai commencé à faire ça presque tous les soirs, si je ne le faisais pas, je ne me sentais pas bien.

Donc j’ai commencé à m’intéresser au maquillage et à la coiffure et depuis ce jour, c’est devenu une véritable passion. Alors j’ai demandé à mon père si je pouvais continuer mes études dans cette voie. Au début il était contre, il trouvait ça un peu bizarre pour un homme, mais au fil de nos discussions il a fini par accepter. À 17 ans, j'avais toujours les affaires de ma mère. J’ai continué de m’habiller en femme tous les soirs dans mon petit studio alors que mon père n’en savait rien, il n’a jamais rien remarqué, ou bien ne le voulait pas. J'ai eu quelques relations avec des gens, mais beaucoup se sont moqués de moi quand ils ont su que j'aimais me travestir en femme. Ils ne me comprenaient pas... Alors j'ai lâché l'affaire, de toute façon personne ne pourrait comprendre pourquoi j'ai commencé à faire ça. Et puis je suis tombé amoureux d'un garçon. Il était mignon, adorable et souriant. J'ai attendu longtemps avant de l'inviter dans mon studio parce que je savais qu'il pourrait se moquer de moi et de mes robes. Quelle ne fut pas ma surprise de le voir… si enjoué par cette découverte ? C’est vrai, j’ai tellement vécu caché qu’il ne m’était jamais venu à l’esprit de me rapprocher de la communauté Drag Queen. C’est ce garçon qui m’a donné l’occasion de le faire. Il avait des contacts, des amis qui étaient prêts à m’aider. Mais il me restait un détail à régler...

Mon père. Je l’ai invité un soir, je l'ai fait rentrer dans mon studio et je lui ai tout expliqué, de A à Z. Je pensais qu'il allait comprendre lui, parce qu'il avait toujours été un père aimant et attentionné avec moi. Mais il a crié. Il s'est mis en colère, demandant au bon Dieu qu'est-ce qu'il avait bien pu faire pour que je devienne une personne aussi malsaine, se demandant ce qu'il avait raté dans mon éducation. Puis il s'en est prit à moi en me disant que je n'aurais jamais dû garder les vêtements de ma mère, que j'allais raté ma vie. Et il s'en est pris à lui-même, se maudissant d'avoir été un mauvais père, d'avoir tout raté, qu'il aurait préféré n'avoir jamais rencontré ma mère pour finir avec « ça ». En d'autres termes, il disait qu'il aurait préféré ne jamais avoir d'enfant... En tout cas c’est ainsi que je l’ai interprété. Alors je l'ai mis à la porte et j'ai coupé les ponts. J'ai obtenu mon diplôme et je suis parti vivre à Paris. C’est ce jour-là que j’ai véritablement commencé à vivre. D’abord je me suis fait engagé en tant que maquilleur dans un petit cabaret à Pigalle, puis je me suis lancé dans la coiffure et le maquillage à mon compte. Le monde du spectacle était fantastique, il l’est toujours d’ailleurs, même ses mauvais côtés me fascinent encore aujourd’hui…

A force d’être dans les coulisses de tous ces strass et ces paillettes, j’ai fini par devenir envieux et je me suis dit « Et pourquoi pas moi ? ». J’ai repris contact avec le garçon qui m’avait aidé. De fil en aiguille il m’a donné les contacts des personnes dont il m’avait parlé et je n’ai pas attendu plus longtemps pour me lancer. J’ai d’abord participé à différents petits concours qui m’ont permis de développer ma communauté sur internet, puis j’ai commencé à faire des Drag Show en remplacement. J’aimais bien ça, l’idée d’aller de bar en bar, de cabaret en cabaret, découvrir ce monde qui était le mien depuis des années sans que je ne le sache… C’est ce mode de vie qui m’a conduit jusqu’aux États-Unis, où j’ai bâti ma réputation grâce à ma petite french touch. De là ma popularité a grimpé en flèche, jusqu’à m’amener sur les devants de la scène avec l’émission RuPaul Drag Race. Ce jour-là j’ai cru rêver… Et me voilà ici, à présent.

- Wouaaah ! Et bien dis donc, quel parcours Declan ! Ou devrais-je plutôt dire, Asmodée ! Je suis vraiment très impressionné, ça n’a vraiment pas été facile pour vous…

- Asmodée, c’est très bien. Et oui, c’est vrai, néanmoins c’est aussi ce qui me construit, je ne regrette absolument rien et je n’ai pas raconté tout ça pour me faire plaindre. C’était simplement pour montrer qu’on peut partir de rien et accomplir tout ce que l’on souhaite, il existe tout un tas de chemins possibles. »

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« Wouaah, tu m’avais pas dit que tu venais de Paris, Patron !
- Eh, je savais bien que j’aurais pas dû donner cette interview. Retournes à ton poste au lieu de te tourner les pouces, andouille. »

Que tu soupires alors que tu termines d’arranger la coupe d’une cliente. Où est-ce qu’il a bien pu trouver cet extrait ? Ça fait 3 ans que l’émission de RuPaul à laquelle tu as participé a été diffusée, de l’eau a coulé sous les ponts et ta popularité est redescendue depuis que tu as drastiquement diminué tes activités scéniques. Ce n’est pas pour te déplaire, seul reste ceux qui ont un réel intérêt pour ton travail et avec le salon fraîchement ouvert, tu t’es assuré un revenu régulier et stable. C’est comme glisser doucement vers la retraite, mais sans encore avoir dépassé la trentaine. Avoir entendu les bribes de cette vieille interview te laisse dans une étrange nostalgie, celle d’une jeunesse pas si lointaine, sous les roues du Moulin Rouge avec l'expansion toujours croissante des danseurs hybridés.

C’est pour ça à l’époque que tu avais commencé à ajouter des accessoires comme des cornes, une queue ou des ailes, puis leur création et les possibilités que ces excroissances animales donnaient à tes tenues t’ont véritablement passionné, encore aujourd’hui. Et cet attrait pour les hybridations est sans doute ce qui t’a conduit à intégrer Unity. C’est arrivé un peu par hasard, t’as ramassé un hybride blessé dans une ruelle de Brooklyn, tu lui as donné les premiers soins et quand il t’a dit que tu n’aurais pas dû le faire, que tu allais avoir des problèmes parce qu’il serait sans doute recherché par son maître abusif et fortuné, tu as eu une idée. Changer l’apparence du malheureux, maquiller son visage et ses parties animales, lui en ajouter des factices, colorer ses cheveux, changer sa coupe, tout ça pour l’accompagner dans une sécurité relative jusqu’à un refuge Unity.

Là-bas, ils ont salué ton talent, le réalisme de ton travail. Quelques mots échangés puis une proposition. Est-ce que tu serais capable de le refaire et de bon cœur ? Ton aide serait la bienvenue, tes compétences atypiques n’avaient jamais réellement été prises en compte, mais à voir le résultat, ce serait un véritablement plus pour eux. Évidemment que tu as accepté, déjà parce que tu es comme ça, ta générosité a toujours été une de tes grandes qualités comme un de tes pires défauts. Mais tu acceptes aussi par plaisir personnel, parce que l’idée de pouvoir expérimenter tes maquillages et tes costumes sur d’autres que toi, ça te plaît, ça te manque. Alors sous couvert d’un salon de coiffure et de maquillage un peu grudge, tu offres des “prestations supplémentaires”. Tu commences d’ailleurs à te faire un certain nom au sein de leur réseau, tu espères simplement que ça ne prenne pas trop d’ampleur, parce qu’elle est confortable, ta petite semi-retraite…