Tous les éléments composant l'univers, les astres, l'eau, la terre … l'air. Sont un jour amenés à se rencontrer, à fusionner, à se mêler et créer la vie telle qu'on la voit sous nos yeux. Une Terre de paix où loge des millions d'individus, uniques, seuls … Sombres. Ils créent la vie pour la défaire, la pourrir, la noircir de miasmes jusqu'à ce que plus aucun filin de lumière ne puisse pénétrer dans ce gouffre de ténèbres. Alors certains succombes, d'autres airent sans but et une infime poignée d'entre eux continuent de marcher lentement et sans crainte, un peu plus profondément dans les abysses. Sans torche, ni flamme, ni âme.Râ est né le 3 Août 2033, il faisait très chaud ce jour là. La terre avait finit par rendre le sol infertile, ne laissant que des traînés d'herbes sèches et sans couleur qui se froissaient au contact des pas sur le sol. Mêlant ainsi de nouveau la poussière à la terre. Ce jour là les parents auraient dû savoir. L'accouchement avait été long et sans répit pour la maman qui, a bout de force, avait faillit succomber pour donner la vie. Comme si l'humanité n'était pas assez crédule, ses parents y virent un signe, un symbole de force qui lieraient les trois individus sur la carte de la famille unie, et sans secret. Pourtant déjà à sa naissance, le porteur d'un nom divin était sali par les actes de son paternel et la perfidie de sa mère. Lui qui ne savait encore guère tout ce qui se tramait par delà les travers de son père, travestissant ses actes par un faux amour offert à une femme qu'il ne considérait même pas.
Il n'avait pas demandé à naître.Pourtant bien qu'entouré d'amour et de bonheur, Râ n'avait rien vu de tout cela dans son enfance. Lui qui avait été bercé à chaque pleur, nourri à chaque demande et protégé du moindre danger. Protégé de qui ? De quoi ? Des autres du clan de son père qui n'en savaient rien. Du monde.
Tout, autour de lui, n'était que félicité alors que des drames à l'extérieur de ses murs se préparaient et se commettaient en toute impunité. Tout était caché, tout était mis à l'écart pour ne pas savoir alors que le jeune garçon savourait pleinement sa vie d'offrande et de bonheur.
Ne voyant que rarement son père qui s'inventait une vie de travail, le jeune garçon passait le plus clair de son temps avec sa mère. Une mère aimante certes, qui elle aussi n'avait rien demandé à tout cela, rien demandé à l'amour. A son insu, elle aussi semblait s'être accroché à une lueur d'espoir qui la mènerait peu à peu au chaos.
An 2047.Râ était un jeune adolescent quand sa vie avait totalement basculée. Un tournant radical auquel il ne s'attendait pas. Quittant subitement le domicile dans lequel il vivait reclus avec sa mère pour soudainement entrer dans un domaine plus luxueux. Tout avait un autre goût soudainement. Plus sincère, comme un voile de mensonge qui soudainement s'était levé de sur leurs têtes.
Puis soudainement cette fille, d'à peu près son âge. Jamais encore ce jour Râ n'avait vu un visage aussi triste, plein de colère et de dédains. Pour la première fois il rencontrait la haine, une matière plus sombre qu'il n'avait pu l'imaginer. Et cette gifle qui avait arpenté les murs en échos alors que les pleures de cette dernière venait de s'éteindre. Sa sœur ? Depuis quand avait-il une sœur ? Alors les premières vérité éclatèrent au grand jour, un premier bourgeon de lycoris dans une plaine de corolle.
Ce jour là, il aurait aimé la voir de plus près, lui prendre la main. Quelque chose l'avait retenu à rester là auprès de sa mère, regardant ainsi celle qui n'en avait plus. Il aurait aimé la prendre dans ses bras, lui dire qu'il n'y était pour rien dans toute cette histoire. Hélas rien ne fût et tout s'était éteint dans les yeux de la pauvre enfant.
La vie continue pour le jeune Râ. Une vie toujours aussi riche et pleine de dons. Pourtant plus les jours avancent et plus cette saveur commence à devenir insipide. A trop vouloir le gâter, Râ ne reconnaît plus le goût des fruits qui lui sont offert. Les morceaux de la toile de sa vie commencent à se composer autour de lui. Son père lui inculque les formalités de son travail, de sa vie, de la mafia.
Il n'avait pas demandé à être.L'école n'a pas été son fort. Du-moins les professeur, l'entourage, les élèves … Déjà à cet époque il commençait lentement à se renfermer dans sa bulle. Les visages de ses camarades avaient fini par s'estomper dans son esprit ne laissant que des coquilles vides sous iris. Ses premières crises de colères étaient nées, supportant de moins en moins la frustration. Celle de ne pas pouvoir, celle de ne pas être à l'image qu'il devait être dans le regard des autre, celle de n'être personne.
Une fois ce fut de trop lorsqu'un livre traversa la pièce pour venir se loger dans le visage de son professeur. Sous les yeux ébahis des autres êtres vivant le côtoyant. Un serpent était né au plus profond de ses entrailles, s'insinuant le long de sa colonne vertébrale avant de se loger dans ses pensées tel un feu ardent impossible à éteindre.
L'école fut finie. Les cours à la maison commencèrent.
An 2051Enfermé dans son huis clos dans les habitations traditionnelles, Râ avait finit par adopter ce tempérament solitaire. Bien que fidèle à son entourage il ne voyait plus rien du monde qui l'entourait. Son père avait pris le relais sur l'éducation, encore trop mielleuse à son goût. Malgré tout ce qu'il avait pu faire ses parents le voyaient encore comme le petit roi de la famille. Pourtant étranger à leur amour.
Le temps était passé, trop vite pour ceux qui l'entouraient. Probablement personne encore n'avait compris que derrière ce miroir de paraître était né une personne aux idées plus lointaine que ce qu'ils imaginaient. D'où lui était venu cette haine pour les hybrides ? Probablement des premières magouilles que Râ avait apprise via la mafia. De cette idée de hiérarchie. De cette suprématie. De cette ville.
Si un visage lisse et un regard sincère se posaient sur les faciès de ses proches, son esprit lui était vide. Il n'y avait déjà plus que lui. Son idée de vie, sa hiérarchie. Sa suprématie.
Il n'avait pas demandé à paraître.Son père lui enseigna les rudiments de la gestion. L'argent, les placements, et les autres délits facilement masquable derrière un billet vert.
An 2053 [TW Drogue]
Première soirée. La ville se découvre à nouveau sous ses yeux. Chaque pas qu'il faisait au milieu de ses flaques reflétant les néons criards des boîtes de nuit, le ramenaient lentement à la réalité. Pourquoi était-il sorti ? Si son dieu protecteur l'avait mis sur ce chemin alors il fallait le découvrir.
Accompagné de deux hommes, ceux qu'il pouvait considérer comme les plus proches, il avait décidé de laisser tomber, le temps d'une soirée, ce qu'il était devenu à force de vivre en reclus. Ce qu'il aperçu ce soir venait une nouvelle fois changer la perception de la vie. La ville, les humains, les hybrides. Des sourires, des regards, des baisers. Des épaules qui le frôlaient, des rires malsains résonnant le long du béton, des tours de passe-passe, des billets verts, de l'alcool de la drogue.
Ce soir, Râ perdit pied. Jamais il ne s'était autant amusé, jamais il n'avait réussit finalement à se défaire de ses chaînes dorées, que ses parents avaient gentiment placé à ses poignets. Jamais encore il n'avait savouré le plein plaisir de l'ivresse et des hallucinogènes. Jamais personne ne lui avait dit que l’ecstasy pouvait avoir ce genre d'effet. Un plein plaisir et de puissance, dans lequel, ce soir … Il resta potentiellement bloqué. Perdu dans un palais de glaces. Sans fin.
Il n'avait pas demandé à sortir.Les soirées alors se multiplièrent, laissant un nouveau chemin s'ouvrir devant ses yeux : le monde de la nuit. Bien que porteur du nom du soleil, c'est sous les fils d'argent de la lune que serait son royaume.
An 2055Râ avait emprunté de l'argent à son père pour pouvoir ainsi commencer à construire sa propre vie. Il était temps pour lui de se dégager de ce cocon où l'air commençait cruellement à manquer.
Ce fût l'Insomnia qui vu le jour un premier. Une grande boîte de nuit au centre de Chinatown. Et très rapidement elle fit ses preuves. Râ, qui avait tout appris de son père sur la gestion, menait cela d'une main de maître. Videur, barman, streap-teaser … Tout était en place pour attirer le plus de monde possible. En quelques mois la boîte de nuit était rempli presque tous les soirs. En une année, Râ avait remboursé son père.
Il n'avait pas demandé à réussir.En deux années le nightclub tournait à plein régime et Râ n'avait pas tardé non plus à faire rentrer les magouilles de la mafia derrière les stroboscopes. Ici régnait la drogue et les plaisirs charnels de luxes.
Râ s'y perdit d'autant plus. Son corps et son esprit n'était plus face à cette réussite soudaine. Une nouvelle fois son dieu lui avait sourit, caressant du bout des doigt son corps et son âme.
An 2059«
Open up the door … Can you ... »
La porte était restée close, malgré toute ses tentatives d'appels. Seul en haut de cet immeuble, il observait à nouveau le monde. Cette personne avait tout simplement disparu. Pourtant il s'y était attaché. Lui qui n'avait jamais accepté l'amour, son cœur s'était soudainement enflammé. Son esprit s'était enfin apaisé, un liserai d'or avait glissé entre ses doigts lui montrant un chemin nouveau dans lequel il pourrait enfin être heureux. Hélas les porte se sont closes ce soir. Plus de nouvelle. Plus de signe. Plus de cœur.
Était-ce la fin ? Pourquoi était-ce aussi douloureux de vivre cela. Il aurait pu en crever sur le champ. Pourtant assis là. En face du soleil se riant de lui. Il était une nouvelle fois seul. Le temps s'étira, ne lui laissant plus le choix que d'éteindre ce brasier. Cette fois c'était sûr. Il n'ouvrirait plus son cœur à quiconque s'approche de lui. Les humains sont perfides et sans foi. Ce n'est que seul, qu'il trouverait sa voie.
Peut-être n'y avait-il pas assez de place pour l'amour et la gloire.
Il n'avait pas demandé à aimer.Après des heures à méditer alors que la lune avait pris la place du soleil. Il fallait qu'il rentre. Il allait bientôt pleuvoir.
Pourtant, il n'y avait aucun nuage.
An 2061La vie était devenue comme tu la connaît aujourd'hui. La fête, seul. Vivre, seul. Avancer, seul.
Bien qu'entouré de sa famille pour qui il compte toujours de l'estime, le ressenti sera toujours le même.
Son pouvoir s'était doucement étendu après le rachat de deux autres établissement. Notamment ce petit bar, le Red Dragoon qui rapidement était devenu comme une seconde maison. Toujours fourré dans l'arrière salle à observer la population brassant l'argent blanchit pour les Zhang.
Ce qui autrefois ressemblait à ses excès de colères n'existe presque plus et pourtant un rien peu le faire dégoupiller.
La drogue ne l’intéressait plus comme avant, elle avait fini par le rendre malade, ne laissant que de plus rares occasions à sa consommation. L'alcool reste monnaie courante dans ses mœurs. Tuer est devenu lentement une habitude.
Il n'avait jamais demandé à tuer.Sans qu'il ne s'en aperçoive sa renommée avait fait le tour des lieux. Un gamin colérique qui n'a réussi que par le biais de ses parents. La jalousie rendait certains réticents et d'autres voyaient un moyen de se remplir les poche. Fort de désillusion, Râ avait compris que rester loin des rats ne lui apporterait que meilleure réussite.
Finalement, ce n'est que les nuits de repos, perdu dans les bâtisses du clan à observer les étoiles qu'il trouve un peu de réconfort. De temps à autre son père le rejoint, murmurant des discussions patriarcales, sinon c'est sa mère qui débarque, posant sa tête sur ses genoux, elle caresse ses cheveux, chantonnant des berceuses au claire de lune.
Mais l'instant qu'il préfère, c'est quand sa sœur s’assoit sur le ponton non loin de lui. Ils se regardent, souvent il sourit, sincèrement content de la voir. Il n'y a pas réellement de conversation, d'ailleurs le silence règne, mais sa présence lui suffit. Souvent il s'imagine une vie où il a su la réconforter ce jour là. Alors, elle aussi est heureuse. Lui l'est d'autant plus. Ses pensées s'évadent alors qu'elle assure sa protection, laissant place au sommeil dans un dernier écho d'une mélodie, dont seule sa mère connaît les paroles.
« Dors mon enfant,
dors mon trésor.
Haut s'en est allé mon bébé,
Je l'entends pleurer.
Loin dans le ciel,
L'oiseau s'envole à tire d'aile
Il part et me laisse,
Seul à ma peine.
Dors mon enfant,
Dors mon trésor.
Après un dernier câlin.
A demain matin.
... »
An 2063Les jours passent et ne se ressemblent plus. Râ est a présent encré dans sa réalité. La gestion de ses établissements est irréprochable. Certains sont même devenu des lieux cultes. La mafia y a grandement installé son potentiel d'action. Plus personne ne semble vouloir se mesurer à lui, s'il n'a pas un minimum d'intérêt à ses yeux. Râ est devenu grand et majestueux à l'image qu'il rêvait être. Ce qui se passe en dehors de son petit monde et celui de ses proches ne l'importe que peu. Les guerres, l'infection. Rien ne semble le perturber dans sa tour d'ivoire.
Peut-être le temps finira-t-il par lui jouer des tours.
De toute façon, il n'a rien demandé.