Je ne suis pas du genre sociale. Je suis plutôt une personne qui reste en retrait, je n'aime pas me mêler à la foule et préfère de loin la compagnie d'un bouquin que celle d'un.e inconnu.e. Je ne déteste pas les gens, bien que je puisse paraître froide à cause de mon air taciturne, je n'ai aucune animosité gratuite envers qui que ce soit. Disons plutôt que je n'ai jamais beaucoup été en contact avec d'autres personnes et cela me met mal à l'aise, j'ai souvent du mal à savoir comment agir ou réagir et la communication est l'une des choses les plus compliqué à pratiquer selon moi. Alors en restant à l'écart, je ne risque pas d'offenser qui que ce soit et ça me permet d'observer les autres en silences.

Ce recul par rapport aux autres est un avantage. Si j'ai du mal à communiquer, je n'ai aucun mal à comprendre les autres que ce soit dans leurs paroles, leurs sous-entendus ou leur gestuelle. Le corps parle souvent plus que la bouche et c'est en observant une personne que je peux apprendre à la connaître et savoir comment agir. Bien que je sois solitaire, je ne suis pas une sauvage pour autant, j'essaie toujours de faire bonne figure bien que mon langage me mette parfois en porte-à-faux me donnant un haïr hautain. Je me retrouve parfois à devoir me justifier pour calmer les animosités et je n'aime pas ça. Mais je comprends que ma façon d'être peut être irritante ou blessante, alors je prends sur moi.

Le peu de relation que j'ai nouées sont, pour la plupart, fausses. J'ai appris qu'il est plus facile d'être apprécié quand je ne suis pas moi-même, quand je suis souriant, calme, compréhensive. Je joue souvent un rôle qui n'est pas le mien, je m'adapte à mes interlocuteurs. Je mens. Je mens beaucoup. Pour faire plaisir. Pour ne pas blesser. Pour me justifier. Pour me sortir d'un mauvais pas. Lorsque je suis mal à l'aise et que je laisse l'angoisse prendre le dessus. C'est si facile de mentir. J'ai conscience que ce n'est pas toujours correct, je trompe, je mens, je manipule pour me simplifier la vie, par automatisme, oubliant que parfois le masque tombe et se brise.

Et j'ai assez de recul pour savoir que tout ça me détruira un jour, que cette carapace est si fragile et qu'il ne me restera plus rien. Plus que moi. Le vrai moi. Le moi qui n'est rien. Qui a oublié qu'il existait derrière ce voile. Alors pourquoi continuer ? Je pourrais couper le mal à la racine et reprendre une vie plus saine. Laisser le vrai "moi" s'exprimer. La réponse est pourtant si simple. J'ai peur de ce monde que je connais à peine. De ce monde auquel mon "moi" n'a jamais été confronté. Je ne veux pas qu'il se brise, alors je le protège. Je me protège. Du mal autant que du bien.

Alors on dit de moi que je suis mystérieuse, gentille, intelligente, modeste, sage, si bien qu'on vient me demander conseil, que l'on vient me parler lorsqu'on à besoin d'une oreille attentive. Je créée moi-même mes propres démons. Est-ce qu'ils viendraient toujours me voir avec ce sourire aux lèvres s'ils connaissaient "moi" ?

Je ne me souviens pas de grand chose de mon enfance. Même pas du visage de mes parents. Mon premier souvenir, ce sont ces hommes qui m'ont emmené loin d'eux. Je ne me souviens de ne pas avoir pleurer. Trop jeune pour comprendre que je ne les reverrais plus jamais. Pendant un moment, je voulais savoir pourquoi ils m'ont abandonnée. Est-ce qu'on ne leur a pas laissé le choix ? M'ont-ils échangé contre une grosse somme d'argent ? Étais-je une enfant difficile ? Je crois que je ne le saurais jamais et je ne suis plus sûre d'avoir envie de savoir à l'heure actuelle.