À première vue, Getou semble être le parfait flâneur coureur de jupon qui, à la moindre occasion, se retrouve allongé sous un arbre à somnoler, parfois dormir. Il est dit de ne jamais se fier à la première intuition et pourtant, la première intuition est la bonne lorsqu'il s'agit du Yakuza. Bien qu'il soit sous une montagne de responsabilité, le cheveu dans sa main reste prédominant et lui attire de nombreuses fois les remontrances de son supérieur. S'il est ainsi aujourd'hui, il ne l'a jamais toujours été et, parfois, les anciens démons surgissent de nouveau et son attitude égoïste, colérique et imprévisible refait surface.

Getou, c'est la fausse nature tranquille : bien qu'il n'apprécie guère être dans les conflits, il n'hésitera aucunement écraser la personne face à lui si un avantage pour lui se présente. Il n'est pas du genre à répondre facilement à la provocation mais ses colères ont souvent été accompagnées d'une grande conclusion sanglante, le sang sur ses mains est désormais beaucoup trop important pour qu'il puisse simplement le laver et pourtant, aucune once de culpabilité ne traverse son esprit, c'est tout simplement comme s'il avait effectué une tâche des plus banales à ses yeux.

Amateur d'alcool raffiné, il n'est pas rare de le retrouver un verre à la main, femmes et hommes à ses côtés et appréciant la bonne musique tintant dans la pièce. Pour lui, s'enrichir encore et encore lui permet de pouvoir goûter à toutes ces liqueurs se bonifiant avec l'âge et coûtant, pour certaines, une petite fortune.

C’est lors d’une nuit de printemps en 2026 que le premier cri du chérubin se fit entendre, dans l’une de ces nombreuses planques dans Kabukichō. La jeune femme avait finalement mis au monde son être cher dans ce quartier peu fréquentable pour une demoiselle de son acabit en pleine nuit. À peine remise des ces nombreuses heures de travail que son pauvre enfant lui fut arraché des mains et confié à cet homme qui, depuis le départ, observait en silence dans le fond de la pièce, son visage camouflé par l’obscurité. Les cris de détresse de la pauvre inconnue étaient si fort qu’un sédatif lui avait été administré.

« Faites-là disparaître. »

Arrachée de son enfant puis finalement portée disparue, le nouveau-né avait été finalement remis dans les bras d’une autre femme sous le regard souriant de son bien-aimé alors qu’une mallette avait été donnée à l’étrange homme qui s’était emparé du bébé. La jeune mère, infertile, était désemparée et souhaitait à tout prix avoir un jeune garçon à élever. La chance sourit toujours aux plus fortunés.

Getou a grandit dans l’ignorance totale entourant la sombre histoire de sa naissance mais rapidement, son tempérament colérique et ses multiples tentatives d’évasion en pleine nuit rendait le jeune gamin ingérable et la mère commençait d’ores et déjà à éprouver des regrets. Pourquoi avaient-ils choisi cet enfant plutôt qu’un autre ? Père constamment absent, trop occupé à gérer la fortune familiale n’avait guère d’attaches pour le gamin, son seul souhait avait été de rendre sa femme heureuse et de venir à bout de l’ennui constant dont elle se plaignait autrefois.

Simple adolescent et pourtant fauteur de troubles, le jeune garçon est rapidement devenu un gaillard à problèmes et ses fréquentations l’entrainaient progressivement vers les bas-fonds. Alors qu’il n’avait à peine quinze ans, Getou l’avait finalement rencontré au détroit d’une ruelle dans laquelle il s’était encore battu contre un pauvre passant : cet homme mystérieux et pourtant fort charismatique. Rapidement charmé par l’allure de cet étranger, ce dernier avait décelé en lui une personnalité qu’il souhaitait mettre à profit pour sa famille, un jeune qu’il aurait pu rapidement formater pour pouvoir prendre la relève de l’ancienne génération. 2041 a été l’année décisive pour Getou, celle qui venait de changer définitivement sa vie.

Pris sous l’aile de cet inconnu, il est finalement entré dans le monde de la délinquance, commençant par de petits méfaits sans grandes conséquences, quelques vols à la tire, du racket et de la surveillance. Sans un regard en arrière, un beau soir, Getou s’était envolé de la maison pour de bon. Il était las d’entendre sa mère le supplier de revenir sur le droit chemin, d’être le parfait petit garçon qu’elle souhaitait tant avoir, il était las de l’absence constante de son père, de l’ignorance totale dont il lui faisait part. Il avait finalement trouvé un réel père sur qui compter, un père qui lui apprenait la dure réalité de la vie, celui qui l’avait aidé à s’imposer dans ce monde impitoyable.

Les années s’écoulèrent et après s’être fait un nom dans la délinquance, Getou menait une double vie alors qu’il avait été recueilli par sa nouvelle famille. Jeune lycéen aux yeux des civiles, apprenti yakuza fraîchement arrivé dans l’ombre. Ses plans étaient ambitieux, son « père » le poussait également à persévérer dans les études, il voulait faire de lui un homme intelligent, malin et surtout un requin. S’il l’avait fait entrer dans cette famille, il ne souhaitait pas faire de lui un simple sbire mais bien plus.

Au fil des années, son esprit s’était affuté encore et encore, sa loyauté n’était plus à prouver et ses connaissances avaient servies maintes et maintes fois pour le clan si bien que lors de son vingt-septième anniversaire, Getou fut finalement envoyé en Amérique : le trésorier avait été froidement abattu et il était temps pour lui de faire de nouveau ses preuves et de s’emparer du monde de la délinquance New-Yorkaise.

Trafic d’hybrides, d’armes et drogues, racket d’humains, évasion fiscale, Getou était derrière chaque opération lors de son arrivée dans la capitale. Désormais à la tête des finances du clan, rien ne se déroulait sans qu’il n’en soit informé, chaque négociation, chaque action impliquant l’argent de la famille ne pouvait s’effectuer sans son accord. Getou s’était finalement fait une place importante et désormais, il pouvait tout bonnement profiter des plaisirs de la vie au détriment des autres. Il était devenu celui que l’on craint, celui qui écrase les autres afin de monter encore plus haut, celui dont on ne veut pas devenir l’ennemi.