La propagande est à la démocratie, ce que le gourdin est à la dictature.

Bien sûr, il est tout à fait possible de faire usage du gourdin ET de la propagande, qu'importe l'état dans lequel on se trouve. Meg a été aux ordres d'Humanis à une époque de sa vie, quand elle était soldate.
Alors, comment la capitaine Ryder, la diplômée de West Point, est devenue une activiste pour l'égalité raciale? Par dégoût envers la violence et la discrimination. Bien avant de croiser des hybrides à New-York. C'est dans un pays en guerre, à voir un énième un type qui y allait contre son grés, que la vocation lui est venue. Un amour de la paix et de la liberté, au mépris de l'ordre social de l'époque.

Dans la vie de tout les jours, Meg est à peu près ce qu'on attend d'une lobbyiste ou d'une journaliste ; calme, souriante et charismatique. Elle a l'œil pour le détail, reste attentive aux sous-entendus, se méfie des réponses qu'on lui donne et garde une façade très diplomate. Le genre à inviter ses voisins pour un barbecue estival ou à être prendre le café avec le sheriff. Malgré ses cicatrices, Meg est du genre à se fondre dans la masse. Passe partout, elle semble ne jamais jurer dans le paysage et trouve toujours un bénéfice ou une leçon à tirer. Très polie, attentive à son apparence et veillant à toujours satisfaire aux attentes, Ryder renvoie souvent une image très lisse. Le genre à éviter la confrontation.
Toutefois, cela ne veut pas dire que Meg n'a pas d'armes. De nature passive, elle préfère agir indirectement et laisser les autres faire le sale boulot, conseiller les bonnes personnes et se protéger en s'entourant d'alliés potentiels. En privé, elle sait se montrer acerbe et émettre un jugement critique envers les autres. Ou au contraire, prendre la défense de ses camarades. Entre amis, elle sait exprimer ses opinions avec le tact qu'il faut et a une certaine intelligence sociale.
Le plus grand défaut est aussi la plus grande qualité de Meg, celui d'avoir une loyauté inébranlable. Peut-être un vestige de son passage à l'armée, mais Ryder est du genre à pas abandonner ses amis. Même lorsqu'elle aurait une bonne raison de le faire.

De manière ironique, Meg est sans doutes l'une des plus modérées d'Unity. Partisan de l'éducation et de la propagande, les actions violentes ou médiatiques ne mèneront à rien. Il n'est même pas question de voir Humanis tomber de son vivant. Pour elle, il faut faire un travail de grignotage, saper la culture actuelle et la remplacer par une autre, éduquer les gens. C'est un combat culturel de fond qu'il faut mener, le genre à se faire sur plusieurs années pour faire changer les choses. Il ne sert à rien de vouloir changer les lois si les mœurs ne suivent pas, Chroma a mis des décennies à s'installer, elle mettra autant de temps à tomber.

En marge de ses engagements politiques et de son tempérament, Ryder écrit et dessine. 90% de son temps est libre est investi dans ses deux loisirs et lorsqu'elle n'est pas en train de s'y adonner, cela a probablement un lien plus distant avec ces deux passions. Intellectuelle, Meg adore écrire des articles, des histoires, créer des pièces de propagande. Ce qui compte pour elle est de toucher le lecteur.

Meg vient d'une famille de militaire. Le genre de famille où ce n'est pas le grade qui compte, mais les aventures. Où l'armée n'est qu'un grand stage d'aguerrissement avant de devenir mercenaire, ou explorateur. Originaire de Baltimore, Meg est une élève brillante, douée en sport, qui intègre l'académie militaire de West Point et en sort avec les honneurs. Nommée sous-lieutenante, elle est intégrée à un régiment de soldats du génie.

D'aucun dirait que le génie militaire est une affectation assez variable : un jour on déblaie un passage au C4 pour l'infanterie et on ouvre la marche. Le lendemain, on fait exploser des munitions périmées quelque part au fin fond du désert. Pour Ryder, c'est l'occasion d'enfiler une veste pare-éclats et de raconter sa vie devant les caméras. Officier de presse, c'est son titre : c'est elle qui répond aux questions des journalistes, prend des photos pour les revues de l'armée et briefer les soldats quand ils sont interrogés par un fouille-merde. De même, quand l'aviation se rate et bombarde la mauvaise maison, c'est elle qui présente des excuses publiques. Le genre de boulot ingrat qui paie bien, du moment qu'on sait lire un script et improviser au bon moment. Meg réussit l'exploit d'être apprécié aussi bien de la troupe (parce qu'elle a toujours des clopes sur elle) que des officiers supérieurs (car elle ne gaffe jamais).
Toutes ces réussites la font passer au grade de capitaine. Mais tout change lorsque durant une mission de routine : une interview sur la destruction de munitions périmées. L'un des démineurs en charge de l'opération s'est trompé dans un calcul et sur la distance de sécurité, une explosion qui coûte la vie à quatre personnes, un journaliste et en blesse six autres.
Ryder est rapatriée en urgence, un bras déchiqueté par les shrapnels et des éclats d'obus sur une moitié du visage. Imprégnés de phosphore blanc, les shrapnels lui occasionnent des brûlures. S'ensuivent trois mois d'hospitalisation intensive, une amputation du bras et une greffe de peau pour son visage.

Suite à cela, comme tout les blessés de guerre, l'armée lui offre une prothèse, une médaille et une pension d'invalidité. En échange de quoi, elle est déchargée de ses fonctions et renvoyée à la vie civile.
Les premières semaines sont difficiles, elle vit chez une amie qui travaille à Unity. Une médecin de son régiment, qui a quitté l'armée au plus tôt pour se consacrer aux luttes sociales. Pour le bien de son compte en banque, Ryder se trouve un job de lobbyiste pour les industries des armes à feux. Là encore, un boulot ingrat : aller sur des plateaux télés pour se fritter avec des proches de gens morts par armes à feu, faire des contre discours après une fusillade sur un campus et bien pis. Par ses talents rhétoriques et par pistonnage, Unity finit par la recruter à plein temps en tant que publicitaire.

Certains diraient que c'est hypocrite, d'engager une ancienne humanis pour faire du marketing. Qu'être un "pubard", c'est réservé à une élite idéologique. Mais les affiches et les pamphlets sont anonymes. Peu de gens savent que derrière certains discours virulents contre la doxa en place, les articles incendiaires à l'égard du pouvoir en place, se cache Meg.
Bien sûr, rien de très subversif ni d'inquiétant pour le pouvoir en place. Mais la propagande fait son petit effet, les gens se mettent à croire ce qu'on leur répète à longueur de journée. La voie de la tolérance est finalement plus attrayante que l'esclavage des hybrides. Certains y croient parce qu'ils veulent payer moins cher un hybride, ils se disent qu'un salarié n'a pas à être entretenu, juste payé. D'autres au contraire, pensent qu'en refusant de jouer le jeu de Chroma, ils font une bonne action.
Pour Ryder, c'est surtout l'occasion d'écrire et de dessiner au nom d'une cause qu'elle apprécie plus que les autres. Parfois, elle se laisse même attendrir par certains de ses collègues, les idéologues naïfs. Il faut de tout pour faire un monde.